Disparition de Paul Larzul

OUEST-FRANCE
Vendredi 27 février 2015
Paul Larzul, fondateur de Capitaine Cook, est décédé
L'ancien patron de la conserverie vient de mourir à 85 ans. Un homme qui a marqué la vie économique du petit port  de Clohars-Cranoët dans le Morbihan, et au-delà, pendant de longues années. de la sardinerie à Intermarché.

Paul Larzul, figure emblématique de Doëlan, vient de décéder à l'âge de 85 ans. Ses obsèques se déroulent dans l'intimité familiale, ce vendredi après-midi, à l'église de Clohars-Carnoët.
Né en 1929, pendant la première crise financière internationale, Paul Larzul fils porte le même nom que son père. Après ses études, il rejoint l'entreprise familiale. Depuis des générations, la famille Larzul travaille dans la conserve. À ses débuts, le grand-père, Noël Larzul, conditionnait des sardines, des cuisses de grenouilles et des escargots dans le pays bigouden.
Une sardinerie
Paul Larzul père rachète à Doëlan en 1946, l'usine qui deviendra La Doëlanaise puis Capitaine Cook. Ce sont les anciens établissements René Bézier, une sardinerie rachetée pendant la Première Guerre Mondiale par une entreprise de Boulogne-sur-Mer qui y a développé la Société industrielle du poisson. Paul Larzul père rachète cette conserverie de poissons.
« C'était un ramassis de bâtiments, sans queue ni tête », comme aimait le rappeler Paul Larzul fils. Il évoquait ses souvenirs : « Le fer-blanc et les matières premières comme l'huile et le sucre, manquaient. Les entreprises avaient des bons de rationnement comme tout le monde. »
Une centaine de femmes
Jusqu'en 1950, les établissements Larzul traitent aussi des petits pois et des haricots. Le conditionnement du poisson est alors un travail saisonnier : sardine et thon blanc de juin à novembre, maquereau de février à mai. « Plus appliquées et consciencieuses », une centaine de femmes s'occupent de la découpe et du remplissage des boîtes.
La famille reprend d'autres petites conserveries à Scaër, Agde et Étel. Elle crée la Doëlanaise avec pour emblème une ancienne reine de Clohars-Carnoët, qui porte la coiffe locale. En 1962, Paul Larzul fils succède à la tête de l'empire Larzul. Il rachète la marque Capitaine Cook pour remplacer La Doëlanaise. C'est la grande époque de la pêche à la sardine, dont deux années records en 1956 et 1962.
Paul Larzul, père et fils n'ont de cesse de faire évoluer le petit port et sa pêche, jusqu'à l'investissement complet dans la construction de la cale, au pied de la conserverie. En 1984, il bâtit une usine dernier cri à Plozévet. Un des derniers sardiniers, le Cavalier des Vagues a cessé toute activité en 1976.
Rachat par Intermarché
Après la vente des entreprises de Scaër, Agde et Étel dans les années 1985, c'est au tour de la conserverie de Doëlan (thon et plats cuisinés), en 1988 : « On sentait bien qu'on allait se faire mitrailler par la grande distribution. Et j'allais avoir 60 ans », rappelait encore Paul Larzul fils, en février 2012. Le groupe Intermarché devient le nouveau propriétaire du site de Clohars et de Plozévet en 1988. En 1996, il quitte les rivages et la cale pour la zone de Keranna, à l'entrée de la commune.
L'usinier abandonne peu à peu les conserves pour les produits frais de type surimi ou encore de nouveaux produits comme les sardines à l'andouille ou à la sauce poivron. Du haut de gamme exporté jusqu'au Japon. Quant à l'ancienne conserverie, une friche de 8 500 m2 face à la mer, son avenir reste toujours en suspens.
Les réactions
Gérard d'Aboville, navigateur et homme politique :
« Paul Larzul est un homme qui m'a fait confiance à une époque où ce n'était pas très évident. En 1980, il a pris un risque certain en me sponsorisant. La traversée de l'Atlantique à la rame paraissait folle. Paul est venu sur mon bateau fabriqué avec des moyens artisanaux.
Je me souviens que pour l'époque, c'était un gros budget. Certes, il n'aurait plus rien à voir avec les sommes engagées aujourd'hui dans le sponsoring de la voile, mais c'était 100 % de son budget publicité de l'époque. Je garde le souvenir d'un homme chaleureux. C'était un chef d'entreprise un peu aventurier, qui avait du nez. »
Jacques Juloux, maire de Clohars-Carnoët : « J'ai rencontré Paul Larzul dans le cadre de mon mandat et nous nous sommes vus plusieurs fois en dehors du dossier de l'usine. C'était un épicurien, gourmand de la vie, jovial et accueillant. Quelqu'un de très direct aussi. »
Marcel Raoult, ancien maire :
« La conserverie de Doëlan employait plus de 80 personnes. Paul Larzul, père et fils, ont participé énormément à la vie cloharsienne. Ils ont tellement fait pour le port de Doëlan, avec notamment le financement de la cale Larzul et l'emploi que Clohars devrait nommer une de ses rues Paul Larzul, père et fils.
Daniel Picol, auteur de Conserveries et vie maritime : « J'ai réalisé un DVD sur lui. C'était un génie dans son genre. Il a fait redémarrer la marque Capitaine Cook. C'était un bon copain, affable, avec beaucoup d'humour. Un sacré bonhomme.
Il aurait aimé qu'un projet se fasse avec Annabelle Buffet qui souhaitait donner 400 tableaux de Bernard Buffet à la Bretagne, dont certains auraient pu être exposés ici, dans la conserverie. Ça ne s'est pas fait, au grand regret de Paul. »
Paulette, employée administrative à la retraite : « Lorsque j'avais écrit au directeur pour me faire embaucher à la conserverie en 1974, il était venu me chercher lui-même sur la côte ! C'était un patron comme on n'en voit plus aujourd'hui, très proche de ses employés, il connaissait tous les prénoms du personnel. C'était quelqu'un d'humain, très cultivé et polyglotte. »
Béatrice GRIESINGE

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